Chanson douce x Leïla Slimani
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Que dire du sentiment d’impuissance, de cette sensation d’oppression, de cette impression de malaise constant à la lecture de « Chanson douce » de Leïla Slimani ? Une claque dès les premières pages du roman et un lecteur qui, dès le début, en sait plus que les personnages impliqués. Auréolé du prix Goncourt, ce deuxième roman est une vraie réussite.
Une famille parisienne, bobo, banale. Une mère au foyer qui voit sa vie s’éteindre à mesure qu’elle s’enferme dans une routine domestique. Un père qui ne remarque pas que sa femme est au bout du rouleau et qui poursuit son rêve de devenir un producteur de musique reconnu. Le décor est planté. Alors lorsqu’une amie recommande Louise, nounou exceptionnelle, les parents débordés l’engagent sans beaucoup hésiter. Le piège se referme.
« La vie est devenue une succession de tâches, d’engagements à remplir, de rendez-vous à ne pas manquer. Myriam et Paul sont débordés. Ils aiment à le répéter comme si cet épuisement était le signe avant-coureur de la réussite. »
Happée par l’histoire dès la première phrase du livre, j’avais soif de connaître les circonstances du drame. Acteur du roman, le lecteur essaye de repérer le moindre élément changeant, la moindre situation charnière, le point de non-retour où tout a basculé.
La magie de ce roman opère grâce au talent de l’auteure qui transforme une banale histoire de famille en terrain propice à l’horreur. Le théâtre de la vie humaine, les affres du quotidien, les travers des personnages qui ne sont ni tout noir ni tout blanc, tout y est ! En même temps, nous avons le droit à une belle satire de la société actuelle ; dans laquelle la réussite, la réalisation professionnelle et l’envie de construire une vie de famille ne font pas toujours bon ménage.
J’ai été entièrement plongée dans ce texte fluide et bien écrit et j’en ai même rêvé… Un livre qui fait froid dans le dos et qui va me poursuivre encore longtemps.
Chanson douce – Editions Gallimard – 2016