Jaune Soufre x Jacques Bablon
Que dire de « Jaune Soufre » sinon que Jacques Bablon nous offre un roman noir sur un plateau d’argent ? Dans la trempe des œuvres de la nouvelle collection néo noire des éditions Gallmeister que j’adore, l’auteur nous embarque dans un univers cynique, vif et grisant – oui, je compte faire des jeux de mots avec les couleurs tout au long de cette chronique – dans lequel le lecteur est instantanément pris en otage.
Les premières lignes annoncent la couleur. Une très jeune femme planifie le meurtre d’un ancien compagnon violent alors qu’elle donne naissance à son premier enfant. Une préparation parfaite et des nerfs d’acier font d’elle une suspecte rapidement lavée de tous soupçons par les autorités en charge de l’affaire. Des années plus tard, la descendance réclame réparation.
Au-delà d’une histoire de meurtre irrésolu, ce roman met avant tout en exergue la complexité des liens familiaux. Relations entre une mère et son fils, entre un frère à la recherche de son passé et une sœur en quête de vengeance, la communication est parfois bien compliquée. Ou comment votre enfance grave à jamais vos actes et votre personnalité d’adulte. Nos failles, nos insécurités, nos douleurs viennent toujours de quelque part, enfouis ou conscients. Ces personnages en sont la démonstration.
« Il y a des hommes dont la présence est souhaitée par leurs congénères. Il avait oublié que ça pouvait exister. Il a envie de gouter à cette sensation. Ce qu’il veut, c’est que des yeux brillent le voyant, qu’on prenne son temps avec lui, être le centre des désirs, regardé comme autre chose qu’une merde. »
Le style est tranchant, sans fioritures et nous amène rapidement à l’essentiel. La richesse des dialogues contraste avec le choix minimaliste des mots. Et puis le rythme est soutenu dès les premiers lignes du roman. Les chapitres courts participent également à ce sentiment d’urgence. Finalement, c’est l’apothéose ! Le puzzle se complète, les filaments se connectent, et tout devient clair : une explosion de sulfureuses émotions.
Un auteur que je ne connaissais pas et un livre reçu dans ma boîte aux lettres. C’est chouette de sortir des sentiers battus en découvrant des écrivains français qui ont de la poigne. A voir ce que donne les autres œuvres de Monsieur Bablon, très branché nuancier chromatique apparemment.
Jaune Soufre – Editions Jigal Polar- 2018